Apothicaire
Les apothicaires et apothicairesses étaient les précurseurs des pharmaciens. Ils préparaient et vendaient les drogues et médicaments pour les malades. « Apothecarius » vient du latin et signifie boutiquier ce qui correspondait aux pratiques des XIIIe siècle et XIVe siècle, où la boutique était l’élément qui différenciait le commerçant sérieux du charlatan de passage.
La naissance de la profession
Au début du XIIe siècle, la préparation des médicaments ne correspondait pas à un métier particulier. Médecine et pharmacie toujours confondues furent exercées aussi bien par des laïcs que des religieux. Au XIIe siècle, le commerce connut un essor remarquable, des foires et des marchés se créèrent en de nombreuses villes d’europe. Les vendeurs de remèdes et d’épices appelés speciarii, piperarri, aromaterii, apothecarii apparurent ainsi que les charlatans, colporteurs, bateleurs, qui allaient de ville en ville proposer des drogues mystérieuses guérissant tous les maux. A la même époque, l’exercice de la médecine et de la pharmacie par le clergé fut remis en question, de nombreux conciles interdirent aux religieux le négoce et l’art médical. Ils ne furent pas immédiatement suivis d’effet mais ils annonçaient la laïcisation future de l’exercice pharmaceutique. La pharmacie se séparait peu à peu de la médecine dès lors que le médecin devenait dépositaire d’un savoir officialisé par l’introduction des études médicales dans les universités, en 1220 à Paris et en 1272 à Montpellier. Il fallait donc le libérer des tâches jugées contraignantes, tel le maniement du pilon et du mortier.
Les apothicaires au Moyen Age
Au Moyen Âge, les connaissances pharmaceutiques antiques sont transmises à l’Occident, grâce aux médecins arabes. Parmi eux, Avicenne est l’auteur d’un Canon de la médecine. Outre des généralités sur la science, l’ouvrage traite de différentes maladies, mais aussi de nombreuses préparations pharmaceutiques : décoctions, sirops, poudres, thériaques. Abondamment traduit durant tout le Moyen Âge, le Canon est orné de miniatures qui mettent en scène médecins et apothicaires.
La société féodale subissait d’importantes transformations sociales. Les marchands et artisans de certains métiers avaient pris l’habitude de se grouper dans des associations héritières des guildes nordiques, connues sous le nom de corporations. Seuls les apothicaires vendaient du sucre et ils appartenaient à la corporation des épiciers. La formation de l’apothicaire était, dans ses débuts, exclusivement pratique, consistant en un long apprentissage des tours de mains nécessaires pour réussir les préparations. Les maîtres apothicaires se chargeaient, dans leur apothicairerie, de l’instruction des candidats à la maîtrise. L’apprenti devait avoir des notions de latin et de grammaire afin de lire les formulaires et les ordonnances des médecins. Après dix ans d’apprentissage et de compagnonnage, l’élève pouvait accéder à la maîtrise à la suite d’épreuves multiples dont la confection d’un chef d’œuvre. Des communautés d’apothicaires se constituèrent. Elles sont à l’origine du caractère réglementé que la pharmacie conserve aujourd’hui. Les premiers statuts s’établirent dans le midi de la France en Arles, en Avignon et à Montpellier. En 1258, Saint-Louis donna un statut aux apothicaires, confirmé par Philippe Le Bel et par le Roi Jean Le Bon en 1339. En 1484, Charles VIII promulgua une ordonnance stipulant que « doresnavant nul espicier de nostre dicte ville de Paris ne s’en puisse mesler du fait et vacation d’apothicairie si le dit espicier n’est lui-même apothicaire ». De nouvelles fonctions incombèrent ainsi progressivement aux apothicaires, contrôle des marchandises et surveillance des poids et mesures. Conséquence sans doute naturelle du régime corporatif, de nombreux conflits s’élevèrent entre les divers corps de métiers : les apothicaires furent aux prises avec les charlatans, les merciers et les Chirurgiens barbiers. Jaloux de ses prérogatives, conscient de la noblesse de son art, veillant à se distinguer d’autres professionnels, membre d’une corporation influente et détenteur de drogues rares et prestigieuses, l’apothicaire du XVIe siècle était considéré comme un notable bourgeois. Par exemple, la vente du tabac, sous forme de poudre, est réservée aux apothicaires.
De l’apothicaire au pharmacien
En 1777, à la suite d’un décret de Louis XVI remplaçant le jardin des apothicaires par le Collège de pharmacie, les apothicaires prennent le nom de pharmaciens et obtiennent, après de nombreuses querelles avec les médecins, les chirurgiens et surtout les espiciers, l’exclusivité de la préparation des remèdes. Cette déclaration sépara les corporations d’apothicaires et d’épiciers reconnaissant ainsi le monopole de la vente des médicaments aux seuls membres du Collège royal de pharmacie. Il officialisait ainsi la pharmacie comme une branche de la médecine nécessitant des études et des connaissances approfondies.
La loi du 31 germinal an XI (11 avril 1803) régira l’exercice de la pharmacie. Elle interdit aux épiciers-droguistes de vendre des drogues simples au poids médicinal. Avant cette loi, la pharmacie n’était régie par aucune législation régulière ; il y avait cependant une foule d’édits qui la concernait. L’organisation moderne de la pharmacie date de cette époque et durant cette période le mot apothicaire disparut au profit de celui de pharmacien.
En Allemagne, de nos jours, on parle toujours d’Apotheker pour désigner un pharmacien, et d’Apotheke pour désigner une pharmacie.
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