Président de la République française
La Présidence de la République est la plus haute fonction du pouvoir exécutif de la République française.
La République française ne s’est dotée d’un Président qu’à partir de 1848 (sous la IIe République). Depuis cette date, cette fonction a été assumée par vingt-trois présidents, qui ont tous résidé au Palais de l’Élysée.
Depuis l’élection du président au suffrage universel en 1962, il s’agit de la fonction politique la plus prestigieuse et la plus respectée en France. Le Président est le chef de l’État, le chef des armées et le garant de la Constitution.
Les autres fonctions, attributions et modes de nomination ont beaucoup évolué dans le temps selon les régimes, mais aussi en fonction des circonstances et des hommes appelés à remplir cette charge. Actuellement, et ce depuis 1958, son pouvoir est tel qu’on parle fréquemment de « monarchie républicaine ».
Des présidents de la République française aux pouvoirs plus ou moins limités
Deuxième République
La révolution de février 1848 chasse le roi Louis-Philippe et instaure la République. Pour décider des nouvelles institutions les constituants s’inspirent des États-unis dont le modèle a été popularisé par Alexis de Tocqueville dans son livre De la démocratie en Amérique publié en 1835. La constitution du 4 novembre 1848 choisit de confier le pouvoir exécutif à un président élu au suffrage universel direct pour une durée de 4 ans. Il peut se représenter après un intervalle de 4 ans. Comme aux États-unis, l’Assemblée et le Président sont totalement indépendants. Mais contrairement aux États-Unis le Président n’a pas le droit de veto. Il peut juste demander une nouvelle délibération sans garantie d’être suivi. Les ministres sont nommés et révoqués par le président.
Louis-Napoléon Bonaparte président de la IIe République
Louis Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon Ier, est candidat à l’élection présidentielle, la première au suffrage universel en France. Il est élu pour quatre ans le 10 décembre 1848, avec près de 75 % des voix, issues notamment du parti de l’Ordre, profitant de la division des gauches et de la faiblesse du niveau d’instruction, certains paysans ayant cru voter pour Napoléon Ier (par défaut l’image de l’ancien empereur était facilement assimilée à celle de son homonyme inconnu)… Le 20 décembre 1848 : il prête serment à l’Assemblée constituante et s’installe le soir même à l’Élysée.
La présidence de Louis Napoléon est ainsi marquée par son opposition à la politique conservatrice de l’Assemblée élue en mai 1849 et majoritairement monarchiste : envoi à Rome des troupes pour mater une rébellion contre le Pape ; vote de la loi Falloux favorable à l’enseignement religieux… Le 31 mai 1850, l’Assemblée vote une loi électorale qui impose une résidence de trois ans pour les électeurs, ce qui élimine 3 millions de personnes du corps électoral, principalement des artisans et des ouvriers saisonniers. En s’opposant à cette réforme, Louis-Napoléon fait figure de héros pour le peuple.
Au début de l’année 1851, Louis-Napoléon Bonaparte demande une révision de la constitution pour lui permettre de se représenter dès la fin de son mandat. La faiblesse de la Constitution de la IIe République était son incapacité à résoudre légalement les conflits entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Devant le refus de l’Assemblée nationale, il fait un coup d’État en décembre, qu’il entérine par un référendum. La Seconde République finit par un régime autoritaire, qui devient le Second Empire en 1852.
Troisième République
Mac Mahon, président de 1873 à 1879
Suite à la guerre franco-allemande de 1870, le 4 septembre 1870, l’empereur Napoléon III est fait prisonnier par les Prussiens à Sedan. À cette annonce, la République est proclamée à Paris, mettant fin au Second Empire. Mais les élections de février 1871 portent à l’assemblée une majorité monarchiste. Les divisions des monarchistes et l’attitude intransigeante du prétendant au trône, le Comte de Chambord, empêchent le retour de la monarchie. Le régime provisoire s’installe dans la durée. Les républicains qui ont prouvé qu’ils pouvaient maintenir l’ordre gagnent la plupart des élections partielles. En 1875, l’assemblée vote une série de textes constitutionnels connus sous le nom de Lois constitutionnelles de 1875. Le Président de la République est élu à la majorité des deux chambres. Il est pourvu de toutes le prérogatives de l’exécutif: direction de l’administration, de l’armée et de la diplomatie. Il a l’initiative des lois, droit qu’il partage avec les assemblées, peut dissoudre la Chambre des Députés avec l’avis conforme du Sénat et contreseing ministériel. Il a également le droit de grâce. Il est irresponsable devant les deux chambres qui ne peuvent le renverser. On a assimilé le président de la République à un monarque non héréditaire car ses pouvoirs sont vastes et il est rééligible. Les pratiques politiques, à partir de Jules Grévy, vont en faire un personnage effacé dans le jeu institutionnel.
Le décret du 17 février 1871 fait d’Adolphe Thiers, un orléaniste, le chef du pouvoir exécutif de la République française en attendant que les députés statuent sur les nouvelles institutions. Thiers, rallié par pragmatisme politique à une république conservatrice, est mis en minorité en mai 1873 par l’Assemblée nationale dominée par les monarchistes et démissionne. L’Assemblée élit à sa place Mac-Mahon, un monarchiste convaincu. Le 21 janvier 1875, l’amendement Wallon fonde la république[1]. Les élections de 1877, après dissolution par le président Mac-Mahon en désaccord avec sa majorité, portent une majorité républicaine au pouvoir. Devant l’impossibilité d’imposer ses vues aux deux chambres, Mac-Mahon démissionne en 1879. Son successeur, le républicain Jules Grévy renonce volontairement à exercer ses prérogatives constitutionnelles (principalement le droit de dissolution) et s’interdit d’intervenir contre les vœux de l’Assemblée.
Conseil des ministres au Palais de l’Élysée, 1882 :
Après un débat houleux, le Président Jules Grévy prend la parole :
« Savez-vous ce que je ferais, Messieurs ? »
S’ensuit un silence respectueux.
« Eh bien, je ne ferais rien ».[2]
Le Président de la République se cantonne donc à une fonction représentative, laissant le pouvoir au président du Conseil et au Parlement. Les présidents de la IIIe République suivent cette pratique. Ceux qui comme Jean Casimir-Périer, élu en 1894, ou Alexandre Millerand (1920-1924) ont essayé de prendre plus de pouvoir sont suspectés de vouloir porter atteinte à la Constitution et sont contraints de démissionner.
Quatrième République
Vincent Auriol, président de la République de 1947 à 1954
La défaite française de 1940 entraîne la fin de la troisième République. De 1940 à 1944, la France connaît un régime autoritaire dirigée par le maréchal Philippe Pétain. À la libération le gouvernement provisoire organise un référendum en 1945 où les Français expriment leur volonté de ne plus revenir aux institutions de la IIIe République. Après avoir refusé un premier projet créant un régime d’assemblée, les Français adoptent la constitution de la IVe République en octobre 1946. Comme sous la IIIe République, le président est élu par les deux chambres pour 7 ans. Il est politiquement irresponsable. Tous ses actes doivent être contresignés par le président du conseil ou un ministre. La possibilité de dissoudre l’Assemblée nationale est transférée au gouvernement. Il choisit toujours le chef du gouvernement mais celui-ci doit obtenir l’investiture des chambres pour pouvoir exercer ses fonctions. Son rôle est donc encore plus effacé que sous le précédent régime. La IVe République a connu en 12 ans deux présidents de la République : Vincent Auriol (1947-1954) et René Coty (1954-1958). son instabilité ministérielle la réduit rapidement à l’impuissance. La crise de mai 1958 fit finalement tomber ce régime.
La Cinquième République
La constitution du 4 octobre 1958 change considérablement le rôle du président de la République. alors qu’il n’occupait depuis 1871, qu’une magistrature d’influence, il se retrouve le personnage le plus influent de la Nation, à la tête de tous les organes constitutionnels, arbitre suprême de la Nation et, depuis 1962, chef de l’exécutif sauf en période de cohabitation..
Les deux lectures de la Constitution
En 1958, la France souffrait de la paralysie de ses institutions. Le pouvoir exécutif était exercé par un gouvernement issu de majorités instables au Parlement. Les changements fréquents de gouvernement au gré des alliances et des ambitions personnelles empêchaient toute politique efficace. Quand il est appelé au pouvoir en mai 1958, le Général de Gaulle souhaita redonner à l’exécutif un pouvoir qu’il n’avait pas les moyens d’exercer dans le régime parlementaire, qu’il qualifiait péjorativement de « régime des partis ». Il voulut donc remédier aux défauts de la IVe République aggravés par la guerre d’Algérie en créant un pouvoir exécutif fort et indépendant.
L’article 5 de la Constitution fait du Président le garant des institutions et de la Constitution, de l’indépendance nationale et de l’intégrité du territoire. Pour les constituants, le président n’a pas vocation à intervenir dans la gestion quotidienne des affaires. Le chef de l’exécutif est, dans les textes, le Premier ministre qui “détermine et conduit la politique de la nation” (article 20). Le chef de l’État est un arbitre entre les différents pouvoirs (article 5) et qui, bien qu’ayant un faible pouvoir autonome, a pour principal pouvoir celui de demander à une autre autorité d’agir. “Cela ne l’empêche pas de donner les grandes orientations du pays, de demander au gouvernement de les suivre et de les traduire dans des textes si nécessaire“[3]. Il assure d’une manière souple la séparation des pouvoirs. Il incarne la France au niveau international et est un recours en cas de situation grave[4]. Dès 1959, De Gaulle fait de la diplomatie et de la défense, le domaine réservé du président de la République.
Cette vision cependant, n’a jamais été mise en pratique, car le premier Président, le général de Gaulle, s’est servi de son poids historique pour s’accaparer l’ensemble des prérogatives de son Premier ministre, Pompidou.
À partir de 1962 et jusqu’en 1986 (date de la première cohabitation), la pratique ‘normale’ des institutions s’est établie. 1962 est une date clé puisqu’elle voit la conjonction de l’élection du Président au suffrage universel direct, responsabilité devant le peuple qui légitime ses pouvoirs, et du fait majoritaire parlementaire favorable au Président (création de l’UNR, l’Union pour la Nouvelle République). La lecture de la Constitution, qui établit un régime parlementaire, se fait dans un sens favorable au Président. De fait, le président de la République est le véritable chef de l’exécutif car il utilise pleinement et même au-delà, les pouvoirs que lui octroie la Constitution. avec le gouvernement, s’établit donc un rapport étroit de collaboration, voire de subordination. La légitimité démocratique donnée par l’élection au suffrage universel l’emporte donc sur les attributions de la Constitution. L’alignement de la durée du mandat présidentiel sur celui des députés, la concomitance des élections avec en premier, l’élection présidentielle, puis au bout d’un mois, les législatives accentuent encore ce lien de subordination.
Cette situation donne au Président français une situation exceptionnelle et mal cernée par les théories du droit constitutionnel classique. On associe en général droit de dissolution et responsabilité devant le Parlement : le chef de gouvernement anglais possède les deux (régime parlementaire), le président américain aucun (régime présidentiel). Dans le système français, c’est le président qui dispose du droit de dissolution, mais c’est le Premier ministre qui est responsable devant le Parlement. Le général de Gaulle, par le biais de son élection au suffrage universel direct en 1962 et de référendum réguliers, a mis en place une responsabilité du Président devant le peuple français : c’est sur un référendum perdu qu’il a quitté ses fonctions. Jacques Chirac, par contre a préféré achever son mandat après l’échec du référendum sur le Traité constitutionnel européen en 2005 alors que ce vote était décisif pour lui et pour le pays[5]. En fait, après de Gaulle, les présidents se sont contentés d’une responsabilité devant le peuple lors de la réélection. Maurice Duverger qualifie la France sous la Cinquième République de régime semi-présidentiel, bien que cette catégorisation soit souvent contestée. L’appellation exacte reste « régime parlementaire présidentialisé ».
Jacques Chirac a connu la cohabitation comme Premier ministre de 1986 à 1988 et en tant que président de 1997 à 2002
- Pendant les périodes de cohabitation, au contraire (1986-1988 ; 1993-1995 ; 1997-2002), la lecture de la Constitution devient plus littérale, on revient donc à un régime parlementaire, tel que l’avait prévu la Constitution, bien qu’il ne s’agisse toujours pas de ce qui avait été prévu originellement. En effet, le Chef du Gouvernement exerce alors pleinement toutes les prérogatives que lui donne la Constitution. Le Président, cependant, ne s’efface pas et conserve un certain nombre de prérogatives, notamment en matière de politique étrangère. L’exécutif devient alors bicéphale.
Pour exemple, on peut citer l’article 8 alinéa 1 où le Président nomme et accepte la démission du Premier ministre. En pratique, il est même arrivé que lors de sa nomination, le Président fasse signer au Premier ministre une lettre de démission non datée, lui permettant ainsi de révoquer son Premier ministre quand bon lui semblait. En réalité, à l’exception de la « démission volontaire » de Jacques Chirac lorsqu’il fut Premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing, tous les premiers ministres ont été révoqués. En période de cohabitation, cependant, ce pouvoir, que les Présidents successifs se sont accaparés, n’existe plus puisque le Premier ministre est alors soutenu par la majorité parlementaire.
L’élection au suffrage universel, facteur de légitimité nationale
Nicolas Sarkozy, actuel Président de la République française
En 1958, le président est élu par un collège électoral qui dépasse largement le Parlement. Environ 80 000 grands électeurs, maires et conseillers généraux, élisent le président. Ce sont donc essentiellement des ruraux qui choisissent le chef de l’État alors qu’une grande majorité des Français vivent en ville. C’est en partie pour corriger ce défaut de représentativité que de Gaulle propose en 1961 d’élire le président de la République au suffrage universel. Il choisit d’utiliser la procédure de référendum direct prévue par l’article 11 de la constitution de 1958 plutôt que de recourir à la procédure de révision normale, avec accord préalable du Parlement telle qu’elle est prévue par l’article 89. Mécontente, l’Assemblée nationale met le gouvernement en minorité. De Gaulle la dissout, procède à de nouvelles élections qui confortent son soutien populaire. Le référendum du 28 octobre 1962 approuve par 61,7% de oui le changement de mode d’élection du président. La loi est promulguée le 6 novembre 1962. Depuis 1962, le président de la République est donc élu au suffrage universel direct. Le scrutin est uninominal et comporte deux tours. La durée du mandat est de sept ans, comme depuis le début de la IIIe République, réduit à cinq ans depuis la réforme constitutionnelle de 2000 instaurant le quinquennat. Cette loi a pris effet pour la première fois avec la réélection de Jacques Chirac en 2002.
Tout le monde ne peut pas être candidat. La loi de 1962 prévoit un patronage de 100 notabilités issues de 10 départements différents. Les présentations sont à adresser au Conseil constitutionnel 18 jours avant le premier tour. Les candidats doivent déposer un cautionnement de 10 000 francs remboursés pour ceux qui atteignent 5% des voix. En 1974, 12 candidats arrivent à obtenir les 100 signatures de présentation. Pour limiter le nombre de candidats, la loi organique de 18 juin 1976 prévoit que tout candidat doit recueillir la présentation de 500 élus (maires, conseillers généraux ou régionaux, députés, sénateurs) résidents dans 30 départements différents. Les signatures d’élus d’un département ne doivent pas représenter 1/10e du total. Le nom des présentateurs est rendu public par le Conseil constitutionnel et publié au Journal officiel. Cette loi n’a empêché que temporairement l’inflation des candidats, 10 en 1981, 9 en 1988, 9 en 1995, mais 16 en 2002 et 12 en 2007. Michel Balinski[6] soutient que le financement public et l’égalité du temps de parole dans l’audiovisuel sont à l’origine de cette inflation de candidats. Une des conséquences est la grande dispersion des voix : jusqu’en 1974, les trois candidats en tête récoltaient 90 % des voix. Depuis, leur part des voix a fortement décru pour atteindre à peine 50 % en 2002[7]. Le vote du 22 avril 2007 marque un retournement de tendance spectaculaire. Les trois candidats de tête récoltent 75% des voix faisant perdre au premier tour de l’élection son rôle de défouloir.
Valery Giscard d’Estaing, élu président de la République en 1974 après le décès de Georges Pompidou
La propagande électorale est réglementée par la loi du 6 novembre 1962 modifiée par la loi organique du 5 février 2001. Elle prévoit, pendant la campagne officielle, une stricte égalité de traitement des candidats dans les moyens audiovisuels et la création d’une commission nationale de contrôle de la campagne électorale. La loi du 19 janvier 1995 fixe un plafond de dépenses de campagne, 13,7 millions d’euros pour le premier tour, 18,3 millions pour le second tour. Tout candidat se voit accorder une avance sur dépenses de 153 000 euros[8]. La loi prévoit aussi le remboursement forfaitaire de 8% du plafond pour tous les candidats, quel que soit le nombre de voix obtenu, soit jusqu’à 685 000 euros de dépenses. Par contre, les candidats ayant recueilli au moins 5% des suffrages exprimés obtiennent le remboursement de 36% du plafond des dépenses, ce qui peut représenter 6 850 000 euros[9]. tous les candidats ont l’obligation d’établir un compte de campagne publié au Journal officiel 70 jours après le second tour.
Dans certains cas, le Conseil constitutionnel peut décider du report des élections : si un candidat potentiel décède ou est empêché 7 jours avant la date limite du dépôt des signatures de présentation, si un candidat décède ou est empêché avant le premier tour. Si un des deux candidats ayant été qualifié pour le second tour décède ou est empêché entre les deux tours, il faut procéder à une nouvelle élection.
L’élection a lieu entre 20 à 35 jours avant l’expiration du mandat du président en exercice. En cas de vacance (démission, décès), l’élection à lieu entre 20 à 35 jours après l’ouverture de la vacance. En cas d’impossibilité pour le Président, constatée par le Conseil constitutionnel, d’exercer ses fonctions présidentielles, c’est le président du Sénat qui assure l’intérim. Jusqu’à présent, seul Alain Poher a dû assumer cette tâche : en 1969 après la démission de Charles de Gaulle et à nouveau en 1974 après le décès de Georges Pompidou. Le président par intérim ne peut utiliser le référendum ou dissoudre l’Assemblée nationale.
La responsabilité présidentielle
- La responsabilité devant les chambres :
- comme dans les autres constitutions républicaines, le président est irresponsable politiquement devant les assemblées (article 67 de la Constitution) ;
- il est irresponsable pénalement et civilement pour les faits qu’il a commis durant son mandat (article 67). Il ne peut pas être jugé, mis en accusation ou cité à comparaître qu’après un délai de un mois suivant la fin de son mandat. Mais, depuis la réforme du statut pénal du Président du 23 février 2007 il peut être destitué durant son mandat par un vote des deux tiers de la Haute Cour (article 68). Néanmoins, étant donné qu’il n’existe pas plus de définition juridique précise du manquement du Président de la République à ses devoirs, manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat qu’il n’y en avait pour le crime de haute trahison qu’il remplace, certaines doctrines sont amenées à craindre que la Haute Cour (composée de parlementaires) pourrait l’utiliser comme moyen de mise en jeu de la responsabilité politique du Président. Néanmoins, le risque de l’utilisation partisane de cette procédure est diminuée du fait que la mise en accusation est effectuée par un vote des deux tiers des membres de chaque chambre du parlement.
- La responsabilité devant la nation :
- le Général de Gaulle a estimé que le recours au référendum engageait sa responsabilité devant le peuple. Ceci explique pourquoi il a démissionné après l’échec du référendum de 1969, alors qu’il disposait d’une large majorité à l’Assemblée nationale. Ses successeurs n’ont pas suivi la même voie en cas d’échec à un référendum ;
- l’exercice du droit de vote permet également aux citoyens de sanctionner la politique que mène (autres élections durant le mandat du Président, notamment parlementaires) ou a mené un Président (si le Président se présente pour un second mandat). Néanmoins, François Mitterrand a refusé de démissionner après les élections parlementaires favorables à la droite en 1986 (ce qui provoqua la première cohabitation) ; de plus, lors de réélections, la sanction d’une politique menée par le Président n’est pas un facteur unique, ni même le plus important (le chiffre record de 82,21% des voix en 2002 en faveur de Jacques Chirac s’expliquent d’abord et avant tout en raison de la personnalité du candidat concurrent, Jean-Marie Le Pen).
Des pouvoirs étendus
Les attributions du Président de la République
L’article 8 de la constitution de 1958 donne au président le droit de nommer le premier ministre. Celui-ci n’est pas investi par le parlement. L’Assemblée nationale ne peut, le cas échéant, manifester son désaccord qu’en votant une motion de censure a posteriori. Ceci pose une limite à ce pouvoir de nomination car le président doit choisir son premier ministre dans la majorité de l’Assemblée nationale ou la dissoudre. En principe, seule la démission du premier ministre met fin au gouvernement. Mais en pratique, quand le président demande la démission de celui-ci, il lui est très difficile de refuser, sauf en cas de cohabitation. L’article 8 précise aussi que sur proposition du premier ministre, le président nomme les membres du gouvernement. Très souvent le président impose une grande partie de ses choix au premier ministre sauf en période de cohabitation.
La présidence du conseil des ministres est une attribution traditionnelle du président, mais jusqu’en 1958, ce rôle était peu important. Depuis cette date, le président joue un rôle actif. Il fait établir l’ordre du jour et dirige les travaux (Article 9). Il peut exceptionnellement déléguer la présidence du conseil des ministres au premier ministre mais avec un ordre du jour déterminé.
L’article 13 donne au président des attributions réglementaires. Il signe les ordonnances et les décrets après délibération au conseil des ministres. Il partage ce pouvoir réglementaire avec le premier ministre. Il lui arrive cependant de signer des décrets qui n’ont pas fait l’objet d’une discussion au conseil des ministres. L’article 13 précise aussi que le président nomme aux emplois civils et militaires. En fait il exerce cette prérogative pour les emplois les plus importants : les conseillers d’État, les ambassadeurs, les envoyés extraordinaires, les conseillers maitres à la Cour des Comptes, les préfets, les officiers généraux, les recteurs d’académie, les directeurs d’administrations centrales. Pour le reste, il délègue son pouvoir au premier ministre[10].
Président de la République de 1981 à 1995, François Mitterrand.
L’article 14 lui donne de grandes prérogatives en matière de diplomatie. Il symbolise l’État français auprès des autres pays. Il accrédite les ambassadeurs et les envoyés extraordinaires, met en application les nouveaux traités. Ces attributions sont traditionnelles pour un chef d’État en France. Le fait nouveau est son intervention dans la négociation des traités. Il prend aussi les décisions les plus importantes.
L’article 15 fait du président le chef des armées. Il préside les comités supérieurs de la défense. Depuis 1996, il engage la force nucléaire. Jacques Chaban-Delmas avait appelé les affaires internationales le “domaine réservé” du président. Ce rôle n’est, à l’origine pas déterminé par le constituant, mais il est entré dans les moeurs.
La constitution de 1958, soucieuse de réguler la vie parlementaire permet au président d’intervenir dans celle-ci. Il ouvre et clôt les sessions extraordinaires par décret soit à la demande du premier ministre, soit à celle des parlementaires. En théorie, si les conditions légales sont réunies, il doit signer le décret. En 1960, le président a refusé de réunir une session extrordinaire pourtant demandée par la majorité des députés; même chose en 1987, période de cohabitation alors que la demande émanait du premier ministre[11]. Par contre, les sessions ordinaires ne relèvent pas de ses prérogatives.
Le président possède le droit de dissolution de l’Assemblée nationale. C’est une prérogative personnelle sans contre seing, mais il doit respecter certaines conditions comme consulter au préalable le premier ministre et les présidents des deux chambres. Il n’est en rien tenu de suivre leur avis. La dissolution est une arme efficace contre les parlementaires tentés de s’opposer au gouvernement. Les nouvelles élections doivent avoir lieu entre 20 et 40 jours après la signature du décret. Depuis 1958, on compte 5 dissolutions, la dernière en 1997 est la seule qui n’a pas donné au président la majorité escomptée. Le droit de dissolution a cependant quelques limites : le président ne peut procéder à une nouvelle dissolution pendant un an. Celle-ci est impossible quand l’article 16 est mis en œuvre.
Le président est chargé de la promulgation des lois dans les quinze jours suivant leur adoption par le Parlement. Il ne peut se soustraire à cette obligation mais il peut avant l’expiration du délai de promulgation demander une nouvelle discussion d’une partie ou de toute la loi, ce qui ne peut pas lui être refusé (article 10)[12].
Le président a le droit de saisine du conseil constitutionnel, sans contreseing avant la promulgation d’une loi (Article 61 alinéa 2). C’est un moyen non négligeable de contrôle du travail parlementaire. Enfin, l’article 11 donne au président le droit d’en appeler directement au peuple en organisant un référendum. Toutefois les sujets sur lesquels peut porter un référendum sont strictement encadrés par la constitution : il s’agit de l’organisation des pouvoirs publics, constitutionnels ou non, de l’autorisation de ratifier un traité international, et depuis 1995, des réformes relatives à la politique économique et sociale de la Nation et aux services publics qui y concourent. Le gouvernement ou les assemblées peuvent aussi proposer au chef de l’État l’organisation d’un référendum, mais celui-ci peut refuser.
Les attributions du président en relation avec l’autorité judiciaire sont elles aussi très importantes. Il est le garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire. Il a le droit de grâce mais il a l’obligation de prendre auparavant l’avis du conseil supérieur de la magistrature. De plus le décret de grâce doit être contresigné par le premier ministre et le ministre de la justice. En 1958, le président nommait les 9 membres du conseil supérieur de la magistrature, ce qui lui permettait d’influencer grandement l’autorité judiciaire. Depuis 1993, il n’en nomme plus qu’un. Il nomme aussi trois des neuf membres du conseil constitutionnel ; il est à noter que les présidents de la République sont à la sortie de leur mandat membres de droit de ce conseil.
Les pouvoirs du président en période extraordinaire
L’article 16 permet au président dans des périodes de crise de concentrer presque tous les pouvoirs. Il fixe les conditions dans lesquels il peut être mis en application. Les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire, l’exécution des engagements internationaux doivent être menacés d’une manière grave et immédiate. Il a beaucoup été reproché à cette phrase son flou, laissant la possibilité d’une interprétation arbitraire. L’article 16 fixe cependant une autre condition qui donne une garantie plus importante contre l’arbitraire sans l’exclure totalement. Il faut que les circonstances aient pour conséquence d’interrompre le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels. Il existe aussi des conditions de formes peu contraignantes. Le président doit consulter le premier ministre, les présidents des assemblées et le conseil constitutionnel. Il doit informer la Nation de sa décision.
Le président se saisit alors des pleins pouvoirs. Il peut prendre toutes les mesures exigées par les circonstances. La constitution ne fixe aucune limite mais l’article 16 précise que ces mesures doivent être inspirées par la volonté d’assurer le retour à la normale dans les moindres délais. Se pose le problème de contrôle du président en période extraordinaire. En effet, si le parlement continue à se réunir, il n’a aucun pouvoir de contrôle car le président est irresponsable devant lui. Le président ne peut cependant ni dissoudre l’Assemblée nationale, ni organiser un référendum pendant toute la durée de la mise en application de l’article 16.
L’article 16 n’a été mis en application qu’une seule fois, en 1961 après le putsch des généraux à Alger. La situation a été vite rétablie mais l’article 16 avait été maintenu pendant 5 mois. Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, le juge totalement obsolète[13].
Les textes
La Constitution
Les caractéristiques du mandat et de la fonction présidentiels sont définis par la Constitution de la Cinquième République aux articles 5 à 19. La place même de ces articles dans le texte fondamental montre l’importance nouvelle donnée à la fonction.
Les prérogatives du Président de la République sont soit :
- dispensées du contreseing ;
- soumises au contreseing en vertu du même article.
Prérogatives dispensées du contreseing [modifier]
- Pouvoirs traditionnels (présents avant 1958) :
- Par rapport au Gouvernement :
- Nomination du Premier Ministre (Article 8, alinéa 1).
- Acceptation de sa démission (idem).
- Par rapport au Parlement :
- Droit de message aux Assemblées (Article 18).
- Dissolution de l’Assemblée nationale (Article 12), mais pas du Sénat. Il ne peut dissoudre de nouveau dans l’année qui suit.
- Pouvoirs nouveaux (spécifiques à la Ve) :
- En période normale :
- Par rapport au corps électoral :
- Référendum, sur proposition du Gouvernement ou proposition conjointe des deux assemblées, relatif à une loi ou à la ratification d’un traité (Article 11). Le résultat du référendum lie le Président.
- Par rapport au Conseil constitutionnel :
- Nomination : Nomination de trois membres du Conseil constitutionnel et choix de son président (Article 56).
- Saisine :
- contrôle de constitutionnalité d’un traité (Article 54).
- contrôle de constitutionnalité d’une loi (Article 61 alinéa 2). Seules les lois parlementaires sont contrôlées, refus du Conseil de contrôler le contenu des lois référendaires (comme les modifications de la Constitution issues d’un référendum, elles sont l’expression directe de la volonté du corps constituant originaire).
- En période exceptionnelle : en vertu de l’article 16, le Président peut prendre :
- des Actes de gouvernement (non contrôlés par le juge) ;
- des décisions législative ou réglementaire (contrôle du Conseil constitutionnel, mais non public).
Prérogatives soumises à contreseing
- Pouvoirs internes :
- Par rapport au Gouvernement :
- Nomination et révocation des membres du Gouvernement sur proposition du Premier Ministre (Article 8, alinéa 2).
- Présidence du Conseil des ministres (Article 9).
- Signature des ordonnances et des décrets en Conseil des ministres (Article 13).
- Pouvoir de nomination aux emplois civils et militaires (pouvoir réglementaire autonome attribué au Premier Ministre) (Article 13 alinéa 2).
- Par rapport au Parlement :
- Promulgation des lois (Article 10 alinéa 1).
- Demande au Parlement une seconde délibération d’une loi ou de certaines de ses dispositions, qui ne peut lui être refusée (Article 10 alinéa 2).
- Ouverture et clôture des sessions extraordinaires du Parlement, hors les cas où celui-ci se réunit de plein droit, à la demande du Premier ministre ou de la majorité absolue de l’Assemblée nationale (Article 30). C’est une compétence liée.
- Initiative de la révision de la Constitution sur proposition du Premier Ministre (article 89). Il a le choix, lorsqu’il ne s’agit pas d’une proposition de loi référendaire (initiative du Parlement) – auquel cas la proposition doit obligatoirement faire l’objet d’un référendum – entre soumettre le projet de loi (initiative du Gouvernement) entre le référendum ou le congrès (rassemblement des deux chambres du Parlement).
- Par rapport à l’autorité judiciaire :
- Présidence du Conseil supérieur de la magistrature et nomination d’un de ses membres (Article 64 à 66)
- Droit de grâce (Article 17), contresigné par le garde des Sceaux. Contrairement à l’amnistie, ce droit ne supprime pas l’infraction mais diminue ou supprime la peine.
Jacques Chirac et George W. Bush en juillet 2001
- Pouvoirs externes :
- Diplomatie :
- Chef de la diplomatie : accréditation des diplomates, diplomates étrangers accrédités auprès de lui (Article 14).
- La loi (parlementaire ou référendaire) autorise la négociation et la ratification des traités par le Président.
- Défense (Article 15) :
- Chef des armées.
- Présidence des Conseils et Comités supérieurs de la Défense nationale.
Les présidents de la Cinquième République
Les présidents de la Ve République sont :
- Charles de Gaulle (1958-1965, 1965-1969)
- Georges Pompidou (1969-1974)
- Valéry Giscard d’Estaing (1974-1981)
- François Mitterrand (1981-1988, 1988-1995)
- Jacques Chirac (1995-2002, 2002-2007)
- Nicolas Sarkozy (Depuis le 16 mai 2007, élu pour un mandat de cinq ans)
Conformément à la constitution de la Ve République, Alain Poher, alors Président du Sénat, a également assuré les fonctions de Président de la République, en 1969 et 1974, lors des vacations liées à la démission de Charles de Gaulle et au décès de Georges Pompidou.
Voir aussi : Liste des présidents de la République française
Divers
En France
- Le décret du 12 juin 1996 lui fait disposer de l’arme nucléaire stratégique.
- Il est aussi grand maître de la Légion d’honneur (la plus haute autorité de l’ordre).
- Depuis 1629, le chef de l’État français est proto-chanoine de la cathédrale Notre-Dame d’Embrun. Ce titre honorifique lui est automatiquement attribué, il lui faut cependant venir prendre possession de sa stalle pour que sa distinction soit effective. Ce titre honorifique fut donné pour la première fois à Louis XIII. La distinction n’apporte aucun avantage particulier, excepté une médaille. Le dernier Président qui est venu réclamer ce titre est le général De Gaulle.
- Il est aussi chanoine honoraire de la cathédrale de Saint-Jean-de-Maurienne, depuis François Ier, qui exigea ce privilège lors de son invasion de la Savoie en 1536.
- Le Président de la République est protecteur de l’Académie française. À ce titre, il reçoit tout nouvel académicien, cette audience valant approbation de son élection. Le chef de l’État peut par ailleurs s’opposer au choix des immortels [14].
- Le salaire du président était de 7 084 euros net par mois, jusqu’en 2007. Depuis 2007 l’indemnité mensuelle nette est de 19 331 euros (par mois). La “dotation” annuelle du président, était en 2007 fixée à 101 488 euros dans le projet de loi[15].
En dehors de la France
- En vertu de la Constitution de cette principauté, il est Coprince d’Andorre (régime dit de paréage : il est le Coprince laïc, l’autre co-prince étant un ecclésiastique, l’évêque d’Urgel, en Espagne)
- Le Président de la République française est traditionnellement reçu au Vatican après son élection pour être nommé “premier et unique Chanoine d’honneur” de l’Archibasilique Saint-Jean de Latran à Rome et prendre possession de sa stalle pour que sa distinction soit effective (ce qui, pour l’anecdote, lui confère théoriquement le privilège d’entrer à cheval dans cette basilique). Bien que le titre de chanoine n’est habituellement accordé qu’à un homme de confession catholique romaine, il semblerait qu’une femme qui deviendrait Président de la République pourrait y prétendre, puisque le titre est lié à la fonction présidentielle et non au sexe de la personne qui l’occupe. À ce titre, le président de la République peut prétendre à une stalle dans l’abbaye de Beauchêne (Cerizay), qui est une abbaye de chanoines réguliers de Saint-Jean de Latran.
Résidences
La résidence officielle et bureau du président est le Palais de l’Élysée, à Paris, 55 rue du Faubourg Saint-Honoré.
Parmi les autres résidences présidentielles, on compte :
- Le fort de Brégançon, dans le sud de la France sur la côte varoise, actuel lieu de villégiature officiel.
- L’hôtel de Marigny, à côté du Palais de l’Élysée, lieu d’accueil des représentants étrangers.
- Le château de Rambouillet, habituellement ouvert aux visiteurs et de temps en temps siège de réunions officielles. François Fillon, Premier ministre, l’utilise à la place de la la Lanterne (utilisée elle par Nicolas Sarkozy).
- Le domaine national de Marly-le-Roi, habituellement ouvert aux visiteurs et de temps en temps siège de réunions officielles.
- Le domaine de Souzy-la-Briche, dans l’Essonne, une simple résidence privée, actuellement affecté au Premier ministre en échange de La Lanterne
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